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Angoulême, 1490 - Paris, 1558

©Jean-Marie Poirier, 2004

 

 

    Ainsi s'exprime le poète courtisan Charles Octavien de Saint-Gelais, également évêque d'Angoulême, dans un texte où il s'imagine vieux pour justifier l'évocation nostalgique des folies de sa jeunesse. Ce texte, le Séjour d'Honneur, fut rédigé entre 1490 et 1494. C'est précisément à cette époque que vient au monde, à Angoulême, Melin de Saint-Gelais, dont les historiens ne peuvent assurer avec certitude s'il s'agit d'un fils bâtard ou d'un neveu de notre évêque...

    Quoiqu'il en soit, le jeune homme reçoit une excellente éducation ; il est admis au collège de Poitiers, pour y étudier le droit. Dès 1509, âgé d'une vingtaine d'années, il se rend en Italie pour parfaire sa formation auprès des universités de Bologne et de Padoue. Il en reviendra profondément marqué par son expérience italienne et par ses contacts avec ce monde aristocratique, cultivé et galant, avide de connaissances dans tous les domaines des arts et des sciences. A Paris, on commence à peine à entrevoir tout cela.

    Comme toute personne bien éduquée, selon des critères parfaitement décrits dans le Livre du Courtisan de Balthasar Castiglione - dont Saint-Gelais reverra d'ailleurs la traduction en 1539 -, il avait appris à jouer du luth et à chanter. Ses talents musicaux sont attestés par de nombreuses sources contemporaines. Par exemple, en 1550, Barthélémy Aneau, humaniste et théoricien des lettres, en parle en des termes sans équivoque et le qualifie de pœte, musicen vocal et instrumental. Un peu plus loin il précise :

Monsieur de Saint-Gelais, qui compose, voire bien sur tous autres, vers lyriques, les met en musique, les chante, les jouë & les sonne sur les instrumens... Telz que luy ne s'en trouve pas treize en la grand douzaine.

    L'année suivante, en 1551, Pontus de Tyard, poète féru de musique, le compare même au grand virtuose italien employé par François 1er, le luthiste Albert de Rippe ; s'adressant à son luth, il lui demande d'évoquer la beauté de la femme qu'il courtise :

Y employant la mieux parlante corde

Que touche Albert ou  que Saingelais sonne

 

   Prélude publié par Pierre Attaingngant (1529) ; Hopkinson Smith, luth

Ses qualités musicales et littéraires, sa culture étendue, lui assurent très vite l'estime du roi François 1er et de toute la cour. A son retour d'Italie, en 1518, il est nommé maistre d'hostel du roi. Il partage alors le rôle de poète officiel avec Clément Marot, qui restera son ami toute sa vie. Entré dans les ordres à cette époque, il devient aumonier ordinaire du roi et glane quelques bénéfices abbatiaux qui lui permettent de mener un grand train de vie.

    En 1536, il devient garde de Librairie royale de Blois, fonction qu'il conservera jusqu'à la fusion de cette dernière avec celle de Fontainebleau.

    A la mort du roi François 1er, il passe au service de son successeur, Henri II, et reste le chantre attitré des grands événements de la cour. En 1548, Sébillet couronne sa renommée dans son Art Poétique.

    Un an à peine après cette consécration, Joachim du Bellay, qui représente la nouvelle génération de poètes, attirée par les modèles antiques, publie sa Deffence et Illustration de la langue françoise. Il relègue Saint-Gelais au rang des pœtes courtisans qui ont bon esprit mais peu d'artifice. C'est le début d'une querelle qui l'opposera notamment à Ronsard, pourtant lui-même avocat de l'union de la poésie et de la musique, union sur laquelle Melin de Saint-Gelais avait fondé sa notoriété.

    Melin de Saint-Gelais et le chef de file de la Pléïade finiront par se réconcilier, quelques années plus tard. Mais son époque est révolue. Il meurt le 14 Octobre 1558 et reçoit alors l'hommage de la fine fleur de la poésie française : Ronsard, Du Bellay, Dorat et bien d'autres célèbrent en lui l'ornement de son âge. Quelques années plus tard, son nom est déjà injustement tombé dans l'oubli. Il y restera jusqu'à nos jours...

Jean-Marie Poirier

Ci-dessous Où mettra l'on ung baiser favorable, chanson de Mellin de Saint-Gelais, mise en musique par Clément Janequin (1540) ; Ensemble Polyphonique de France, dir. C. Ravier

 

Cliquez sur la clé pour télécharger la chanson Puisque vivre en servitude, texte de Saint-Gelaisu


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